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Technologie de stockage et de transmission d’informations, la Blockchain est sécurisée, transparente et fonctionne sans organe central de contrôle. Elle est aujourd’hui le coeur d’une révolution aussi importante que le dévelopement d’Internet et soulève de nouvelles opportunités chaque jour.
Inscrite dans la vision stratégique de Monaco, elle revêt des avantages considérables et des possibilités infinies d’optimisation dans de nombreux domaines. Encore récente, cette technologie nécessite cependant un cadre juridique favorable à son développement dans les meilleures conditions.
Il convient donc d’en étudier les détails au travers de :
- La définition de la technologie de Blockchain et ses applications
- Quel cadre règlementaire & quel avenir pour la Blockchain à Monaco ?
1. La définition de la technologie de Blockchain et ses applications
Technologie révolutionnaire et attisant les curiosités des gouvernements, entreprises et individus, la Blockchain a fait son apparition en 2009 grâce à la première transaction réalisée en Bitcoin et n’a depuis cessé de croître.
Bien que difficile de ne pas entendre parler de Bitcoin ou de crypto-monnaies de nos jours, il convient tout d’abord de comprendre les tenants & aboutissants de cette technologie.
a. Définition et fonctionnement
La Blockchain est un mode de stockage et de transmission de données sous forme de blocs liés les uns aux autres et protégés contre toute modification. Elle aspirerait donc à supprimer les tiers de confiance, depuis longtemps nécessaires à notre civilisation.
En d’autres termes, la Blockchain constitue une base de données, tel un registre, où toutes les transactions effectuées sont enregistrées, depuis la création de la technologie. Mathématicien de renom, Jean-Luc Delahaye, vulgarise cette technologie de la façon suivante:
" La Blockchain est comme un très grand cahier que tout le monde peut lire librement et gratuitement, sur lequel tout le monde peut écrire, mais qui est impossible à effacer et indestructible "
En effet, il convient d’ajouter que cette base de données est partagée (entre ses utilisateurs), sécurisée, distribuée et sans intermédiaire.
L’absence de ce dernier est permise grâce à la technique utilisée pour valider les blocs de transactions avant de les ajouter à la chaîne.
Un bloc est validé par les noeuds du réseau, aussi appelés les “mineurs” et consistent en la résolution de problèmes algorithmiques, très gourmand en énergie. Cette validation assure donc la sécurité du système, dans la mesure où elle est effectuée par un ensemble d’utilisateurs différents qui ne se connaissent pas.
b. Applications de la Blockchain
Outre la sécurité, la technologie permet une plus grande rapidité de transactions ainsi que des gains de productivité et d’efficacité et ouvre un champ des possibles considérable quant aux applications qu’elle laisse présager.
On distingue trois catégories prinicipales d’applications :
Le transfert d'actifs
Sont considérés comme actifs : la monnaie, mais aussi les titres, les obligations, les actions, etc. offrant ainsi d’infinies possibilités d’applications.
La tenue d'un registre
Assurer une meilleure traçabilité des produits & des actifs (diplômes, actes de propriété, supply chain, …) difficilement falsifiable car horodaté par ordre chronologique.
Les Smart Contracts
Domaine des plus prometteurs, basé principalement sur la blockchain Ethereum. Ils consistent en l’éxécution automatique des conditions et des termes d’un contrat, sans nécessiter d’intervention humaine une fois lancés.
De la banque à l’industrie musicale, aux domaines de la santé, de l’assurance, … les champs d’application sont infinies et n’ont de cesse d’attirer de nouveaux entrepreneurs.
Nouvelle économie à part entière basée sur cette, non plus si nouvelle, technologie, la Blockchain revêt toutefois de nombreux défis. Ils peuvent être d’ordre écologique, de gouvernance, ou encore juridique.
En effet, la règlementation se doit d’évoluer au rythme de la technologie pour lui proposer ainsi un cadre juridique propice à son développement.
Monaco, dans le cadre de sa vision stratégique doit donc proposer une évolution de sa règlementation, mais où en est la Principauté ?
2. Quel cadre règlementaire & quel avenir pour la Blockchain à Monaco?
Soucieuse de la réalisation de son ambition stratégique, la Principauté de Monaco exprime dans sa vision, son attrait pour la Blockchain. Elle souhaite concurrencer des pays tels que Dubaï, Singapour ou l’Estonie, ayant déjà lancé des projets d’envergure dans ce domaine.
Son ambition s’exprime au travers de deux objectifs principaux :
- Devenir le leader mondial des levées de fonds environnementales
- Trouver une alternative à la création d’une place boursière monégasque
L’émergence de ce nouveau tissu économique et l’appréhension de la Blockchain à Monaco nécessite donc un cadre règlementaire propice à son développement.
Les principaux textes étant :
- Loi 1.482 du 17 Décembre 2019 pour une Principauté numérique
- Loi 1.491 du 23 Juin 2020 relative aux offres de jetons
- Ordonnance souveraine n°8.158 du 18 Décembre 2020 portant application de la loi 1.491
- Annexe 1 de l'Ordonnance souveraine n°8.158 introduisant le modèle de document d'informations à fournir
Ces textes permettent :
a. La définition d'un jeton
Selon la législation monégasque, on distingue donc deux types de jetons, aussi appelés tokens :
Utility Token
Ouvre le droit à un produit ou un service
=
ICO (Initial Coin Offering)
Security Token
Ouvre le droit à une action dans le capital d’une société
=
STO (Security Token Offering)
b. Conditions préalables à l'émission d'actifs numériques
Monaco affiche fièrement la volonté de devenir l’Etat où seront réalisées les levées de fonds les plus sécurisées au monde.
Pour ce faire, les actifs numériques créés à Monaco devront donc répondre à des critères de confiance et de sécurité.
Condition préalable à l’offre de jetons, la personne morale émettrice devra obligatoirement être immatriculée ou en cours d’immatriculation à Monaco.
De plus, la réalisation d’une offre de jetons est subordonnée à l’obtention d’un label.
Ce dernier est délivré par le Ministre d’Etat après avis motivé d’une commission dédiée, composée de 6 membres titulaires, issus du Gouvernement monégasque.
L’obtention de ce label se fait au travers de la délivrance d’un dossier de présentation du projet aussi appelé White Paper. Plus d’informations sur le modèle de document à fournir ici.
Enfin, ce label ne peut être délivré uniquement à des offres de jetons dont la valeur unitaire s’élève à au moins 100’000€. Ce qui nous amène à la notion des fonds recueillis
c. Quid des fonds recueillis ?
Pour respecter son ambition de levée de fonds des plus sécurisés, l’Etat monégasque nécessite de la sûreté.
En l’espèce, les fonds recueillis seront donc placés sous séquestre à compter de l’émission des jetons pour la durée de l’opération et sur un compte bancaire dédié, à Monaco. Les fonds seront transférés au porteur du projet uniquement si l’ensemble des conditions afférentes sont remplies. Cela permettra notamment d’éviter les levées de fonds frauduleuses.
Cette levée de fonds devra être réalisée par l’intermédiaire d’une plateforme numérique autorisée et validée par l’Etat monégasque. Cette dernière devra être basée sur un registre partagée (blockchain) et permettre l’identification de l’émetteur et des investisseurs en conformité avec les normes KYC – AML (Know Your Customer / Anti-Money Laundering).
Le contrôle par l’Etat monégasque de cette plateforme octroiera plus de confiance de la part des investisseurs. Autrement dit, une adéquation entre la crédibilité des porteurs du projet et la conformité des investisseurs.
Une fois les projets sélectionnés et approuvés par le Gouvernement, la société Tokeny, notamment, lancera la plateforme de Tokénisation.
Le système de tokénisation sera basé sur la norme ERC20 d’Ethereum (plus d’infos ici). Les jetons seront compatibles avec tous les portefeuilles Ethereum.
Ces avancées permettront donc :
- Augmenter la liquidité des tokens
- Pallier à l’absence de marché boursier monégasque
- Attirer de nouveaux investisseurs en Principauté et y augmenter les actifs détenus
Technologie encore récente et en constante évolution, la Blockchain regorge d’applications infinies et n’a de cesse d’intéresser entrepreneurs et investisseurs.
Monaco se voulant avant-gardiste a bien conscience de l’enjeu afférent à cette technologie. La Principauté met donc en oeuvre des moyens considérables (juridiques, financiers et économiques) pour attirer des projets liés.
Cette dernière lui permettra d’inscrire son pays parmi les leaders du marché et attirer ainsi de nouveaux métiers à forte valeur ajoutée, investisseurs, et entrepreneurs.
1 commentaire
VILOTTA · avril 29, 2021 à 11:21
Super ! Bravo pour cet article riche en argumentation. Je reste dans l’attente d’un article sur le développement d’entreprise au sein de la communauté monégasque. Belle journée.
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